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Dystrophines Dans Le Système Nerveux : De la Neurophysiologie à la Thérapie Moléculaire – DYSther

Des outils moléculaires pour la thérapie génique dans le système nerveux central et pour la myopathie

Les atteintes centrales dans la myopathie impliquent plusieurs produits du gène de la dystrophine s’exprimant dans les neurones et/ou dans la glie. Le développement d’outils moléculaires spécifiques est nécessaire pour étudier les mécanismes physiopathologiques et envisager des traitements ciblant le système nerveux central.

Comprendre et corriger les altérations neuronales et gliales dans la myopathie

Les biotechnologies ont ouvert des perspectives majeures pour le traitement de la myopathie de Duchenne, mais peu de travaux ont évalué la capacité de ces traitements à corriger les atteintes centrales de cette maladie, alors qu’elles peuvent conduire à des troubles intellectuels et neuropsychiatriques sévères. Pour cibler les atteintes centrales dans ce syndrome, deux défis majeurs doivent être relevés : (1) Mieux comprendre les mécanismes responsables de l’hétérogénéité des symptômes, qui dépend de la variété des mutations associée à l’altération de plusieurs formes de dystrophine jouant des rôles distincts dans les neurones et/ou les cellules gliales et, (2) Concevoir des outils moléculaires capables de cibler ces types cellulaires spécifiques et/ou de traiter plus largement les différents organes affectés.<br />Pour atteindre ces objectifs, nous proposons une analyse pluridisciplinaire, du gène au comportement, des mécanismes physiopathologiques chez des souris génétiquement modifiées présentant une perte spécifique de la forme neuronale ou gliale de dystrophine. Les approches thérapeutiques reposent sur l’administration d’oligonucléotides antisens capables de supprimer la mutation ou de transgènes assurant l’apport exogène de la protéine manquante, véhiculés par des vecteurs spécifiques conçus pour cibler les neurones ou la glie, ou bien couplés à des chimies spécifiques favorisant le passage vers le cerveau suite à une administration dans la circulation générale. L’identification de nouveaux mécanismes neuropathologiques et d’outils moléculaires performants pour la thérapie génique permettra l’émergence de stratégies thérapeutiques innovantes et valorisables, et de nouvelles offres de soin pour de nombreuses maladies génétiques affectant le système nerveux central

Le projet DYSther combine les expertises de 4 équipes, du moléculaire au comportement, dans un consortium multidisciplinaire qui s’attaque à des questions émergentes associant recherche fondamentale et défi technologique pour améliorer les outils de recherche et les stratégies thérapeutiques. Sur le plan méthodologique, nos recherches conduites chez des souris modèles de pathologie s’appuient sur des approches pluridisciplinaires, convergentes et complémentaires de biologie cellulaire et moléculaire, de biochimie, d’anatomie, d’imagerie cérébrale et cellulaire, de pharmacologie, d’électrophysiologie et d’exploration comportementale. Nous utilisons aussi des modèles dans lesquels des gènes spécifiques facilitent l’imagerie cellulaire ou permettent d’activer des réseaux neuronaux spécifiques par des méthodes d’optogénétique, ou encore modulent l’inflammation des tissus nerveux afin d’étudier les facteurs de risque impliqués dans ces processus.
Les nombreuses données générées par cette approche permettent d’identifier des biomarqueurs spécifiques utilisés pour évaluer de manière pertinente l’efficacité des outils moléculaires que nous développons et produisons en grande quantité pour des approches thérapeutiques. Pour que ces molécules circulantes puissent pénétrer les tissus et diffuser dans l’ensemble des régions affectées, nous les couplons à des chimies particulières ou bien nous les véhiculons à l’aide de vecteurs spécifiques, sélectionnés de manière à ce que leur effet thérapeutique puisse également cibler des types de cellules spécifiques.

L’identification d’altérations comportementales dues à la perte des dystrophines Dp427 et Dp71 montre qu'en plus des déficits de mémoire et d'apprentissage s'ajoutent des troubles émotionnels et des dysfonctionnements exécutifs spécifiques de la forme de dystrophine altérée. La souris mdx déficiente en Dp427 présente une hyperréactivité au stress, des altérations du comportement social et un déficit de la mémoire à long terme. Les outils moléculaires développés pour traiter la myopathie en restaurant la présence de Dp427 ont été optimisés pour qu’ils puissent également avoir une action bénéfique dans le cerveau. L’hyperréactivité au stress constitue un marqueur pertinent pour évaluer rapidement l’effet des traitements sur le comportement de ces souris. La Dp71, forme courte de dystrophine associée à des troubles intellectuels sévères chez certains patients, est majoritairement exprimée dans les cellules gliales et intervient dans des mécanismes qui maintiennent l’équilibre ionique du cerveau et régulent la capacité des molécules circulantes à pénétrer le tissu nerveux. Nos récents travaux ont révélé d’importantes altérations du nombre et de la morphologie des cellules gliales et de l’organisation du réseau vasculaire dans la rétine. Les modifications dues à la perte de Dp71 dans le cerveau sont en partie similaires à celles décrites dans la rétine (travaux en cours). Nous avons également sélectionné un vecteur de transfert de gène dans le but de restaurer l’expression de Dp71 dans les cellules gliales pour compenser ces altérations. L'efficacité de cet outil vient d'être validée par nos études sur la rétine. L’ensemble des dysfonctions identifiées dans ces modèles serviront de marqueur d’efficacité des outils moléculaires développés pour les approches thérapeutiques. Les doses optimales des molécules thérapeutiques et des vecteurs nécessaires à ce travail ont été caractérisées et leurs effets fonctionnels et thérapeutiques sont en cours d'étude.

Le projet DYSther apportera de nouvelles connaissances sur fonctionnement du système nerveux central, sur les mécanismes communs à la rétine et au cerveau, et sur l’identification de nouveaux marqueurs pour tester l’efficacité des traitements sur les dysfonctions centrales dans la myopathie. L’objectif majeur est d’identifier et produire des outils moléculaires qui permettront d’aboutir à une compensation par thérapie génique de l’ensemble des symptômes chez les patients souffrant de myopathie. Nous avons également pour but d’identifier les outils moléculaires les plus performants et les conditions optimales pour corriger les gènes défectueux ou compenser leur dysfonction par thérapie génique. Cette recherche devrait donc avoir un large impact sur de nombreuses maladies génétiques impliquant des altérations du système nerveux central et des troubles sensoriels, cognitifs ou neuropsychiatriques.

Nous avons montré que l’absence de la forme complète et neuronale de dystrophine (Dp427) chez la souris mdx conduit à des perturbations des réponses émotionnelles et du comportement social qui pourraient être à la base d’une partie des troubles cognitifs et neuropsychiatriques dans la myopathie (Miranda et al., Mol Autism, 2015; Vaillend et Chaussenot, Hum Mol Genet, 2017). Les outils moléculaires envisagés pour des approches thérapeutiques dans ce modèle ont été optimisés (Relizani et al., soumis).Le rôle glial de la Dp71 a été précisé dans la rétine (Giocanti-Aurégan et al., Glia, 2015). Des isoformes différents de Dp71 sont détectés dans la rétine et le cerveau, suggérant des fonctions variées dans ces tissus (Aragon et al., Mol Neurobiol, 2017). Notre nouveau vecteur permet de restaurer l'expression et la fonction de la Dp71 dans la rétine (Vacca et al., Hum Mol Genet, 2016). Ces travaux ont également fait l’objet de plusieurs communications dans des congrès internationaux ou dans des actions de communication ciblant le grand public.

Les avancées récentes dans l’étude des mécanismes dépendant des dystrophines et responsables de la myopathie de Duchenne (DMD) ont conduit au développement d’outils innovants en thérapie moléculaire. Cependant, leur capacité à corriger les altérations cognitives associées à cette maladie reste à déterminer. Nous avons montré que le saut d’exon thérapeutique est une approche réaliste pour restaurer la dystrophine Dp427 chez la souris mdx, mais l’utilisation de vecteurs de transfert de gènes ne permet pas de traiter simultanément les fonctions musculaires et cérébrales. Nous avons développé de nouvelles chimies couplées à des oligonucléotides et de nouveaux vecteurs pour contourner cet obstacle méthodologique. Toutefois, les déficiences intellectuelles dans la DMD sont liées à la perte cumulée de plusieurs produits du gène de la dystrophine, issus de différents promoteurs internes au gène, comme la dystrophine Dp71 dont la perte est associée aux déficits cognitifs les plus sévères. Réussir une compensation simultanée des dysfonctions motrices et cognitives dans la DMD est donc un défi majeur qui implique l’identification préalable des mécanismes cibles et des biomarqueurs pertinents pour le développement des outils appropriés pour restaurer les fonctions de la Dp427 et de la Dp71.
Le projet DYSther combine les expertises de 4 équipes, du moléculaire au comportement, constituant un consortium multidisciplinaire qui s’attaquera à ces questions émergentes associant recherche fondamentale et défi technologique pour améliorer les outils de recherche et les stratégies thérapeutiques. L’objectif est de mieux comprendre les rôles multiples des dystrophines dans le système nerveux central et de valider des marqueurs d’efficacité des thérapies moléculaires. La première tâche sera d’identifier les déficits affectant des processus cognitifs de haut niveau chez des souris déficientes en Dp427 ou en Dp71, à la lumière des études cliniques les plus récentes, puis de les utiliser comme marqueur d’efficacité de nouveaux outils de thérapie génique, notamment le saut d’exon avec de nouvelles chimies d’oligonucléotides antisense qui passent la barrière hémato-encéphalique et avec des nouveaux vecteurs pour restaurer l’expression de Dp71. Des injections locales et/ou cellule-spécifique permettront aussi d’établir les bases neuroanatomiques des phénotypes. La seconde tâche sera de mettre en commun les connaissances, concepts et expertises issus des études du cerveau et de la rétine pour caractériser le rôle de la Dp71 à l’interface glio-vasculaire. La troisième tâche déterminera l’impact de la perte de Dp71 sur la physiologie gliale dans le cervelet, impliqué dans les dysfonctions cognitives dans la DMD, et d’identifier les similitudes entre cellules gliales de Müller dans la rétine et cellules de Bergmann dans le cervelet, avec des hypothèses centrées sur les mécanismes Dp71-dépendants par lesquels ces cellules contrôlent l’équilibre hydrique et potassique en condition normale ou pathologique. Ces études seront complétées par des approches d’imagerie in vivo par résonnance magnétique (IRM) pour analyser la dynamique et la récupération d’une accumulation d’eau dans le cerveau pendant un œdème ou un épisode d’ischémie/hypoxie. Nous utiliserons aussi les phénotypes mis en évidence dans ces 2 tâches pour tester l’efficacité de traitements modulant l’expression de Dp71 en condition normale et pathologique.
Le projet DYSther apportera ainsi de nouvelles connaissances sur le rôle des dystrophines et identifiera de nouveaux biomarqueurs permettant d’envisager une compensation de l’ensemble des symptômes chez les patients Duchenne par thérapie génique. Les découvertes issues de ces études des fonctions glio-vasculaires, de même que les avancées technologiques associées au développement d’outils moléculaires passant la barrière hémato-encéphalique, sont aussi d’un intérêt critique pour de nombreuses autres maladies du système nerveux.

Coordination du projet

Cyrille Vaillend (CNRS UMR8195)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CNRS CNRS UMR8195
UVSQ UNIVERSITE DE VERSAILLES SAINT-QUENTIN-EN-YVELINES
IDV Institut de la Vision
PSUD/IBBMC Université paris-Sud/Institut de Biochimie et Biophysique Moléculaire et Cellulaire

Aide de l'ANR 540 532 euros
Début et durée du projet scientifique : octobre 2014 - 36 Mois

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