DS08 - Sociétés innovantes, intégrantes et adaptatives

SHAKK-Syrie : conflits, déplacements, incertitudes – SHAKK

Résumé de soumission

Depuis la révolte et la guerre qui s'en est suivie, le savoir produit sur la Syrie relève davantage de l'expertise et du journalisme que du champ académique. Si les chercheurs en sciences sociales continuent à publier sur la Syrie malgré l’impossibilité de se rendre sur place, ils sont souvent enjoints de fournir des analyses directement mobilisables par les décideurs publics nationaux et internationaux. Aussi, ils font face à un double défi : poursuivre leurs travaux suivant un rythme et une approche qui leur sont propres et inventer de nouvelles méthodes qui permettent de se ressaisir du terrain syrien. Comment travailler sur une société en guerre, dispersée, dont les transformations sont toujours en cours ? Comment saisir les phénomènes de dislocation brutale des espaces familiers et des relations sociales ? Comment rendre compte de la violence extrême et du traumatisme ? Comprendre les bouleversements que connaît la Syrie depuis 2011 constitue un enjeu épistémologique, éthique et également réflexif, tant l’engagement du chercheur est devenu quasi inévitable. L’équipe du projet SHAKK entend se saisir de ces différents enjeux dans une perspective pluridisciplinaire et comparative. Associant le Centre d’études en Sciences sociales du religieux (CéSor,EHESS-CNRS), l’Institut français du Proche-Orient (Ifpo) et le département de l’audiovisuel de la Bibliothèque Nationale de France (BNF), l’équipe est composée de neuf chercheurs - anthropologues, politistes, historiens et linguistes - auxquels s’ajoutent un ingénieur d’études, arabisant, spécialiste des Humanités numériques, ainsi qu’un conservateur spécialiste des archives audiovisuelles et des étudiants syriens, exilés en Europe. La mise en commun de compétences scientifiques et techniques est indispensable pour mener à bien un projet dont les ambitions sont multiples.

Il s'agit tout d'abord de revenir sur la genèse de la révolte et des étapes de sa mutation en conflit guerrier à partir des acteurs, des trajectoires, des actions et des récits, jusque-là peu pris en compte. Nous analyserons de manière circonstanciée et située les reconfigurations politiques, religieuses, sociales, territoriales et mémorielles propres à ce contexte d'incertitude (shakk en arabe) et de violence extrême. Nos recherches seront irriguées par une réflexion sur les relations brisées, suspendues et renouvelées par la révolte puis la guerre. Ces relations seront saisies à partir des notions de déplacement et d’indétermination. Déplacement et indétermination des centres de pouvoir ; des identités ; des frontières ; du religieux et du politique ; des catégories et des paradigmes. Ces deux notions sont particulièrement heuristiques pour penser ce moment de l’entre-deux – fait de ruptures, de désordres et de désaccords – qu’est la guerre. Notre équipe engagera également une réflexion sur les méthodes d'enquête : nous travaillerons hors du territoire national syrien tout en cherchant à réduire au maximum la distance imposée par la guerre. Nous réaliserons des enquêtes dans les pays limitrophes de la Syrie (Liban, Jordanie, Turquie et Kurdistan irakien) et en Europe (France, Suède et Allemagne). Nous conduirons des entretiens avec des personnes restées sur place par le biais des messageries en ligne (Messenger, WhatsApp et Skype). Enfin, et c'est la nouveauté de ce projet, l'espace numérique et plus spécifiquement les nombreuses vidéos postées sur YouTube par les différents protagonistes de la révolte et de la guerre constituera non seulement un site d'enquête privilégié dont les outils de collecte, et d'analyse devront être affûtés, mais fera également l'objet d'une réflexion sur la sauvegarde de la mémoire de ces événements. Enfin, nous contribuerons à la formation d'une nouvelle génération de chercheurs syriens, exilés en Europe.

Coordination du projet

ANNA POUJEAU (Centre d'études en sciences sociales du religieux)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CESOR-UMR8216 Centre d'études en sciences sociales du religieux
BnF BnF - Département de l'Audiovisuel
IFPO Institut français du Proche-Orient

Aide de l'ANR 362 612 euros
Début et durée du projet scientifique : janvier 2018 - 48 Mois

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