DS0201 -

Conception d'une plateforme d'ingénierie génomique pour les microalgues – SynDia

Conception d'une plateforme d'ingénierie génomique pour les microalgues

L'objectif principal du projet SynDia est de développer une plateforme de microalgue adaptée à la production industrielle, faisant de ces organismes les acteurs clés de la transition en bioéconomie

Acquérir les connaissances et les méthodologies nécessaires à la création d'une microalgue manipulable avec facilité et prédiction

Face à la raréfaction des ressources fossiles et la volonté de limiter les émissions de gaz à effet de serre, il existe un fort intérêt scientifique, économique et sociétal pour l’utilisation de sources de carbone renouvelable à des fins de production de composés pour les secteurs de la chimie, des matériaux et de l’énergie. Dans ce contexte, la biotechnologie industrielle développe des nouveaux biocatalyseurs capables de répondre à ces défis. De par leur capacité à produire et à stocker 30 à 70% de composés (triacylglycérol, glucides) à partir de CO2 et d’énergie solaire, les microalgues apparaissent comme une solution porteuse d’avenir pour la production durable de biocarburants et d'énergie. Cependant les rendre économiquement compétitives par rapport au pétrole nécessite d’optimiser leur performance, voire de créer de nouvelles propriétés métaboliques. Ainsi, il est nécessaire de développer des méthodologies permettant d'améliorer leur métabolisme.<br />Le projet SynDia a pour objectif d'acquérir des connaissances et de développer des méthodologies d’ingénierie permettant d'accélérer la création d'une microalgue châssis pour la production industrielle. En prenant en compte les spécifications industrielles en termes de robustesse des souches, de stabilité d'expression des gènes, d'outils d'édition du génome, le projet SynDia contribue à réduire cet écart existant en biotechnologie industrielle entre R&D, l'ingénierie des procédés et l'industrialisation.<br />Le projet SynDia est à la pointe de la biologie synthétique. En développant les moyens scientifiques et technologiques nécessaires pour rendre compétitives les microalgues à l'échelle industrielle, ce projet contribue au développement d'une bioéconomie durable en Europe . Ainsi, le projet de recherche SynDia s'aligne clairement sur les priorités de l'ANR, et notamment sur le défi sociétal «Énergie propre, sûre et efficace«.

Parmi toutes les espèces de microalgues, la diatomée P. tricornutum se distingue par son abondance lipidique et sa robustesse dans les procédés industriels notamment pour la production d'acides gras à longues chaines (EPA). En 2014, nous avons pu établir la preuve de concept de son ingénierie métabolique ciblée en créant une souche à haute teneur en lipides (Daboussi. ; et al, Nature Communications, 2014). Dans ce projet SynDia nous allons un cran plus loin. Ce projet est divisé en 3 parties. La première partie est dédiée au développement de stratégies permettant de modifier rapidement et efficacement le génome de la diatomée, Phaeodactylum tricornutum. Ce qui nous permettra par la suite de modifier son potentiel son métabolique. Pour atteindre cet objectif, nous développerons le système CRISPR/Cas9 et ses dérivés comme outils permettant des modifications génétiques multiples. Après avoir mesuré l'impact de ces nucléases sur l'intégrité du génome, nous mettrons en place des méthodologies alternatives d'édition du génome sans introduire d'ADN dans les cellules. Ceci afin d'éviter l'instabilité du génome due à l'intégration aléatoire des vecteurs dans le génome ou les effets toxiques (hors cible), conséquence de l'exposition chronique des cellules aux nucléases.
La deuxième partie est consacrée au développement de méthodologies pour contrôler et réguler l'expression des gènes. Cette partie est divisée en deux tâches distinctes, la première visant à définir un ou plusieurs loci appropriés pour l'expression durable d'un transgène ou d'une voie métabolique artifcielle. La deuxième tâche sera axée sur le développement de méthodologies permettant la modulation de l'expression des gènes contôlant des voies métaboliques existantes et artificielles.
Ces outils et méthodologies seront intégrés pour réécrire le métabolisme lipidique aussi bien quantitativement que qualitativement (workpackages 3) et pour créer des souches à fort potentiel industriel de microalgues.

Nous avons récemment développée une nouvelle méthode permettant de modifier le génome de P. tricornutum avec facilité et prédiction. Cette méthode est basée sur la délivrance du ciseau moléculaire CRISPR/Cas9 sous la forme protéique (RNPs). La puissance de cette méthodologie a été confirmée en créant des souches dont les trois gènes ont été inactivés simultanément (triple knock-out) et ceci sans avoir introduit de marqueur de sélection ni d’ADN dans les cellules.
Ces résultats représentent une avancée considérable à plusieurs niveaux : (i) l’amélioration de la spécificité des méthodologies d’ingénierie des génomes puisqu’aucun vecteur n’est intégré de manière aléatoire dans le génome ; (ii) la réduction du temps d’exposition des cellules aux nucléases et donc de ce fait la diminution des coupures non spécifiques potentielles ; (iii) l’identification et la validation de deux nouveaux marqueurs de sélection positive, évitant l’utilisation de gènes de résistance à un antibiotique. Ce développement permet d’avoir des procédés de production compatibles avec le cahier des charges de la biotechnologie industrielle et de limiter les risques sanitaires et environnementaux ; (iv) l’établissement de la première preuve de concept de la modification génétique de plusieurs gènes simultanément chez les microalgues, ce qui devrait ouvrir la voie à l'étude de familles de gènes multiples aux fonctions potentiellement redondantes.
Ce résultat exceptionnel permet aux microalgues de rattraper les autres châssis industriels (levures, bactéries). Une autre perspective intéressante repose sur le fait que les marqueurs contre-sélectionnables sont très conservés dans l'arbre phylogénétique des microalgues et dans d'autres groupes eucaryotes, ce qui permet de transposer cette méthodologie à d'autres organismes. Ceci est particulièrement important pour les espèces difficiles à transférer ou pour celles pour lesquelles il n'existe pas de systèmes de régulation des gènes connus.

En développant des méthodologies d'ingénierie métabolique permettant d'augmenter la productivité d'un composé désiré, et de produire de nouveaux composés, SynDia permet aux scientifiques de créer des microalgues économiquement compétitives pour les marchés de la pharmacologie, de la cosmétique, de la chimie verte et de l'énergie. Ce projet participera à l'amélioration de la valeur économique des microalgues pour ces marchés et ouvrira la voie à la production des produits pour la chimie et des biocarburants, dont le marché est estimé à 100 milliards et 1 000 milliards de dollars, respectivement.

One-step generation of multiple gene knock-outs in the diatom Phaeodactylum tricornutum by DNA-free genome editing. Manuel Serif, Gwendoline Dubois, Anne Laure Finoux, Marie-Ange Teste, Denis Jallet, and Fayza Daboussi*. (2018). Nature Communications. DOI: 10.1038/s41467-018-06378-9

Face à la forte demande énergétique et la volonté de réduire les émissions de gaz à effet de serre, la société attend beaucoup de la biotechnologie industrielle pour produire de l’énergie et des composés pour la chimie fine ou de masse en utilisant des ressources renouvelables ainsi que des déchets. Par leur capacité à combiner les propriétés des plantes (utilisation du CO2 comme substrat pour la production de molécules complexes) et celles des microorganismes (croissance rapide), les microalgues apparaissent extrêmement attractives pour assurer la transition vers une énergie renouvelable. Cependant, un certain nombre de verrous doivent être levés pour les rendre économiquement compétitives sur les marchés de l’énergie et de la chimie verte.

Pour relever ce challenge, plusieurs initiatives, tant nationales qu’européennes, ont vu le jour pour créer des partenariats entre académiques et industriels, l’objectif étant la prise en compte par les académiques des spécificités et contraintes industrielles afin d’identifier les actions levier à réaliser pour augmenter la compétitivité. Le programme SynDia, en parfaite adéquation avec cette directive, générera une valeur ajoutée considérable et donnera l’élan nécessaire pour accélérer significativement le développement industriel des procédés de biofabrication. Ma double expérience, au sein de laboratoires académiques et société de biotechnologie, me permet de structurer ma recherche autour du développement de connaissances et de méthodologies pour lever les verrous industriels.

La biologie de synthèse, une composante émergente de la biotechnologie industrielle, cherche à développer des biocatalyseurs via une approche d’ingénierie métabolique, laquelle doit permettre d’augmenter la productivité de certains composés mais aussi de construire des pièces, dispositifs et systèmes biologiques créant de nouvelles fonctions. La biologie de synthèse requiert la création d’une microalgue « chassis », robuste dans les procédés exigeants, facilement manipulable et dotée d’un système de régulation efficace. La diatomée Phaeodactylum tricornutum, possèdant certains de ces critères est déjà exploitée industriellement pour la production d’acides gras à longues chaines (EPA).

Pour développer l’ingénierie métabolique de Phaeodactylum tricornutum, il est nécessaire de développer des méthodologies d’ingénierie des génomes plus rapides et plus efficaces pour créer des souches avec de multiples modifications.

Notre programme de recherches vise à développer les microalgues comme biocatalyseurs industriels pour la production d’énergie. Pour réaliser cet objectif, nous proposons de:

1. Développer de nouvelles classes de nucléases spécifiques et moduler les mécanismes de réparation des cassures double-brins en vue d’augmenter les fréquences de modifications génétiques requises pour étudier la fonction des gènes et/ ou créer des souches avec de nouvelles propriétés génétiques

2. Identifier des loci d’intégration des transgènes permettant leur expression efficace et durable, tout en minimisant les effets délétères de l’ingénierie des génomes

3. Générer des modulateurs transcriptionnels et des promoteurs synthétiques à même de réguler l’expression des gènes des voies métaboliques et ainsi de créer des souches capables de réaliser efficacement la conversion des ressources naturelles en des produits industriels

4. Exemplifier la puissance des outils générés pour exploiter chez P. tricornutum la production de biocarburant, en ingéniérant quantitativement et qualitativement le métabolisme lipidique

SynDia offrira une plateforme de microalgue adaptée à la production industrielle, faisant de ces organismes les acteurs clés de la transition en bioéconomie. Il ouvrira aussi de nouvelles voies d’applications en biotechnologies, comme la ré-ingénierie du métabolisme des lipides pour la production de biocarburant et la création de voies métaboliques artificielles pour les secteurs de l’énergie et la chimie verte.

Coordination du projet

Fayza DABOUSSI (Laboratoire d'Ingénierie des Systèmes Biologiques et des Procédés)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

LISBP Laboratoire d'Ingénierie des Systèmes Biologiques et des Procédés

Aide de l'ANR 246 480 euros
Début et durée du projet scientifique : décembre 2016 - 42 Mois

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