DS0901 - Sécurité des citoyens, lutte contre le crime et le terrorisme

Expériences de mesures intra-moléculaires isotopiques pour la Police scientifique : Développement et utilisation de la spectrométrie RMN quantitative 13C et 15N – FRIIME

La résonance magnétique nucléaire de très haute précision pour tracer les produits illicites

Les récents développements de la résonance magnétique nucléaire (RMN) en terme de précision permettent d'envisager de détecter et de quantifier les modifications intimes de la matière par l'établissement d'un profil isotopique. Le projet FRIIME a pour but de développer et d'appliquer cette approche pour établir le profil en carbone 13 et/ou en azote 15 des molécules servant de coupage des drogues ou utilisées comme explosifs de fabrication artisanales.

Mise en place d'un nouvel outil pour tracer le trafic de molécules illicites

Jusqu’à présent, c’est le concept du profilage du produit illicite qui est couramment utilisé comme outil pour lutter contre le trafic de drogue. Ce profilage est réalisé à partir des teneurs en impuretés de synthèse, des solvants résiduels, etc. Le même objectif sera poursuivi dans le projet FRIIME mais en utilisant la teneur isotopique des molécules en question comme marqueur intrinsèque. Aujourd’hui, l’approche utilisée est la spectrométrie de masse (SMRI), qui ne caractérise que la valeur moyenne de la teneur isotopique de la molécule étudiée. <br />FRIIME, en recourant à une méthodologie innovante utilisant la résonance magnétique nucléaire (RMN), permet d’étudier la distribution isotopique position-spécifique des produits ciblés : des explosifs communs de fabrication artisanale (le nitrate d’ammonium ou le nitrate d’urée), des agents de coupage bien connus utilisés avec les drogues illicites (comme la caféine et le paracétamol). La RMN quantitative isotopique 13C, développée récemment, sera appliquée sur les molécules cibles afin d'affiner les données obtenues par spectrométrie de masse (SMRI), comme cela a déjà été démontré pour la contrefaçon de médicaments. En outre, la RMN quantitative isotopique 15N sera développée pour la première fois comme une contribution très pertinente pour les analyses d'explosifs et de molécules impliquées dans le trafic de stupéfiants. En recueillant un grand nombre de paramètres caractéristiques (autant que le nombre de carbone et/ou d'azote constituant la molécule) des produits étudiés, un nouveau paradigme stratégique et tactique est offert aux enquêteurs de la Police Scientifique permettant ainsi des modèles prédictifs de plus grande sophistication, associés à l'origine des matières premières et voies réactionnelles utilisées dans les produits étudiés.<br />

Le projet FRIIME aborde la question générale : « est ce que notre capacité à détecter l’origine d’explosifs artisanaux et des produits impliqués dans le trafic de drogue peut être significativement améliorée en utilisant les données concernant la distribution isotopique intramoléculaire ‘position-spécifique’ ? ». Pour cela il est utile de répondre aux questions scientifiques et techniques suivantes :
(i) La RMN est un outil capable de déterminer les teneurs en isotopes pour chaque atome différent d’une molécule. Cela a été réalisé avec succès pour le deutérium et plus récemment pour le carbone-13 par l’équipe du CEISAM de l’Université de Nantes. Quelles sont les conditions pour une transposition méthodologique vers la mesure de la teneur position-spécifique de l’azote-15 ?
(ii) Quel type d’informations nouvelles les données collectées par les méthodologies développées dans le projet FRIIME, utilisant la RMN, appliquées pour déterminer les teneurs en 13C et/ou 15N de chaque atome de carbone et/ou d’azote constituant la molécule, apportent sur la caractérisation de l’origine des produits étudiés ?
(iii) Quels sont les apports de cette nouvelle approche (mesure isotopique intramoléculaire par RMN) au travail d’enquête de la Police Scientifique au niveau tactique et stratégique ?
(iv) Comment ce nouveau cadre de travail s’applique sur des cas réels de produits illicites (agents de coupage, drogue) saisis et quels sont les bénéfices par rapport aux outils habituels au cours d’une enquête de police ?

Les premiers tests sur l'application de la RMN à l'étude de la répartition isotopique en azote 15 ont porté sur le développement très novateur sur l'augmentation de la sensibilité tout en gardant une précision de 0,1%. Comme décrit dans le projet, une forte augmentation de la sensibilité peut être atteinte par l’utilisation de développements méthodologiques RMN. Une preuve de concept a été obtenue en utilisant la séquence INEPT adiabatique (développée pour le carbone 13). Une double innovation a été mise en évidence : (i) utilisation d’une séquence de transfert de polarisation via les couplages longue-distance (au lieu d'un transfert de sensibilité concernant les les atomes directement lié à un hydrogène) et (ii) obtention d’une réponse quantitative répétable au ‰ permettant l’observation jamais obtenue jusqu'à présent à la fois d’un fractionnement isotopique l'azote 15 normal et inverse dans la même molécule.
En parallèle, le protocole analytique RMN 13C ‘classique’ a pu être utilisé pour l’étude des molécules cibles : paracétamol, caféine, lévamisole, phénacétine. Profitant du développement INEPT 15N longue-distance, la même approche a été validée en carbone-13. Ceci conduit à un avantage, jusqu’ici inaccessible, c’est l’obtention du profil isotopique 13C de tous les carbones, y compris quaternaires, de la molécule mais avec une augmentation de la sensibilité permettant de travailler avec quelques dizaines de mg au lieu de centaines de mg. Cette avancée significative permet de travailler sur des échantillons réels nécessitant des séparations complexes.
Le dernier point abordé a conduit à tester les séparations/purifications des molécules cibles, non pas sur des centaines de mg mais sur une valeur cible de 40 mg. L’obtention de molécules pures en est largement facilitée permettant une automatisation aisée sur le système de flash chromatographie (acquis dans le cadre de ce projet). Le protocole ayant été validé il sera utilisé sur les échantillons réels.

Les isotopes stables sont devenus un outil incontournable pour déceler l’origine de produits alimentaires. En science forensique, les isotopes stables peuvent également être utilisés pour déterminer l’origine des molécules étudiées. Un traçage est donc possible sur les bases de signatures dépendant des matières premières, du procédé de synthèse et du procédé de purification utilsés. Cependant la méthode d’analyse isotopique habituellement utilisée, la spectrométrie de masse (CG-SMRI), est limitée à des molécules volatiles et ne fournit qu’une information globale sue les changements isotopiques de la molécule. Le projet FRIIME rajoutera une nouvelle méthode analytique par RMN pour assurer un traçage dans des molécules de taille plus importante. Ce traçage sera plus fin car il permettra de voir des effets à chaque position (carbone et/ou azote) de la molécule. Ce nouvel outil sera testé sur des échantillons réels de drogue pour lesquels les agents de coupage seront analysés pour avoir un profil isotopique marqueur de leur origine. De nouvelles informations sur les réseaux seront ainsi obtenues.

Un poster a été présenté à un congrès international :
«Development of irm-15N NMR for position-specific isotope analysis.« Poster. Valentin Joubert, Virginie Silvestre, Serge Akoka, Gérald S. Remaud. International Symposium on Isotopomers (ISI2016), 3-6 October 2016, La Cité des Congrès, Nantes, France

D'autres présentations auront lieu en 2017 et les premiers articles seront aussi soumis à publication.

Le projet FRIIME veut répondre à la question : la composition isotopique intramoléculaire peut-elle être utilisée pour améliorer la capacité de la Police Scientifique à rapprocher des saisies différentes d'explosifs de fabrication artisanale et de substances psychoactives pour concourir au démantèlement de réseaux de distribution notamment ?
Jusqu’à présent, c’est le concept du profilage du produit illicite qui est couramment utilisé comme outil pour lutter contre le trafic de drogue. Ce profilage est réalisé à partir des teneurs en impuretés de synthèse, des solvants résiduels, etc. Le même objectif sera poursuivi dans le projet FRIIME mais en utilisant la teneur isotopique des molécules en question comme marqueur intrinsèque. Aujourd’hui, l’approche utilisée est la spectrométrie de masse (SMRI), qui ne caractérise que la valeur moyenne de la teneur isotopique de la molécule étudiée.
FRIIME, en recourant à une méthodologie innovante utilisant la résonance magnétique nucléaire (RMN), va permettre d’étudier la distribution isotopique position-spécifique des produits ciblés : deux explosifs communs de fabrication artisanale (le nitrate d’ammonium et le nitrate d’urée), deux agents de coupage bien connus utilisés avec les drogues illicites (la caféine et la phénacétine) et une substance psychoactive (la méta-chlorophénylpipérazine ou mCPP) faisant partie des NPS ou nouveau produits de synthèse. La RMN quantitative isotopique 13C, développée récemment, sera appliquée sur les molécules cibles afin d'affiner les données obtenues par spectrométrie de masse (SMRI), comme cela a déjà été démontré pour la contrefaçon de médicaments. En outre, la RMN quantitative isotopique 15N sera développée pour la première fois comme une contribution très pertinente pour les analyses d'explosifs et de molécules impliquées dans le trafic de stupéfiants. En recueillant un grand nombre de paramètres caractéristiques des produits étudiés, un nouveau paradigme stratégique et tactique est offert aux enquêteurs de la Police Scientifique permettant ainsi des modèles prédictifs de plus grande sophistication, associés à l'origine des matières premières et voies réactionnelles utilisées dans les produits étudiés.
Les retombées de FRIIME peuvent être attendues dans les domaines suivants:
• Une rationalisation de la connexion entre les sciences forensiques et les activités de renseignement de la police : un accroissement des données obtenues à partir de la répartition intramoléculaire isotopique d’explosifs de fabrication artisanale, sur les drogues illicites et leurs précurseurs. L'étude de cette famille de molécules avec les méthodes proposées dans le projet FRIIME n’est pas seulement une approche pertinente, mais pourrait rapidement devenir fortement pro-active.
• Une méthodologie améliorée, plus robuste par la haute précision de la caractérisation isotopique d'une drogue ou d’un explosif artisanal pour déterminer l'origine des matières premières et/ou le procédé de fabrication utilisé.
Le succès du projet FRIIME nécessite l'interaction de compétences scientifiques en RMN quantitative, en chimie isotopique analytique et en recherche forensique. FRIIME est donc construit comme un projet de recherche collaborative associant deux partenaires publics: 1) l’équipe EBSI de CEISAM (Nantes), apportant son expérience reconnue à l'échelle internationale dans l'analyse quantitative RMN et isotopique et 2) l'Institut National de la Police Scientifique : INPS (Lyon), offrant une longue expérience dans le profilage des drogues illicites, y compris l'utilisation de son propre spectromètre SMRI. L’INPS est dans une position unique pour fournir une collection d'échantillons de terrain, garantissant ainsi un résultat opérationnel, conforme aux attentes des organismes judiciaires et de police.

Coordination du projet

GERALD REMAUD (Université de Nantes)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

INPS Institut National de Police Scientifique
CEISAM Université de Nantes

Aide de l'ANR 377 454 euros
Début et durée du projet scientifique : octobre 2015 - 42 Mois

Liens utiles

Explorez notre base de projets financés

 

 

L’ANR met à disposition ses jeux de données sur les projets, cliquez ici pour en savoir plus.

Inscrivez-vous à notre newsletter
pour recevoir nos actualités
S'inscrire à notre newsletter