DS0801 - Innovations

REConstruire Après un séisme : expériences antiques et innovations à Pompéi – RECAP

Reconstruire après un séisme. Expériences antiques et innovations à Pompéi

Confrontés à un risque récurrent, les bâtisseurs du monde romain ont-ils développé des techniques de construction anti-sismiques ? Entreprise internationale, le programme RECAP implique une approche fortement pluridisciplinaire, sollicitant de façon étroite archéologie de la construction, sociologie, informatique, ingénierie des structures ou encore géologie, dans le but de déterminer les modalités pratiques de reconstruction et les choix techniques adoptés.

Comment reconstruit-on après un tremblement de terre ? RECAP a pour objectif de déterminer les techniques des bâtisseurs romains en Campanie, à travers le cas emblématique de Pompéi.

<br />De façon pluridisciplinaire, ce programme étudie les conséquences des impacts sismiques en Campanie, et plus particulièrement à Pompéi, dans l’optique de déterminer l’existence d’une culture du risque sismique dans l’Antiquité. De par son contexte géologique particulier, la ville de Pompéi et sa région constituent un « laboratoire » exceptionnel. Pompéi a pour particularité d’avoir été victime de deux tremblements de terre précurseurs de l’éruption du Vésuve de 79 après J.-C. Le premier, en 63 après J.-C., est bien connu car évoqué dans des textes de Sénèque et Tacite, alors que le second, ayant eu lieu aux alentours de 70, est seulement identifié par les données archéologiques obtenues sur site.Le projet repose donc sur un pari scientifique ambitieux : restituer les conditions de reconstruction et les choix techniques adoptés face au risque dans cette ville romaine emblématique. Pour cela, il associe une approche quantitative de l’intensité et des effets produits par les tremblements de terre et une approche qualitative des conditions socio-économiques ayant déterminé les priorités de reconstruction et l’évolution des matériaux et méthodes utilisés.<br />RECAP se décline selon trois objectifs principaux :<br />1. Établir l’intensité des impacts sismiques sur le site de Pompéi, à partir de l’identification archéologique des anomalies architecturales et d’une modélisation de la résistance structurelle ;<br />2. Produire un atlas des techniques de construction post-sismiques ;<br />3. Appréhender la conscience de la vulnérabilité que pouvaient avoir les bâtisseurs dans les opérations de reconstruction.<br /><br />

Le projet associe différentes méthodes complémentaires.
- Archéologie des techniques de construction
L’étude stratigraphique des élévations met en évidence les différentes phases de construction des bâtiments et en propose une chronologie relative. D’une part, elle permet l’identification des traces de l’action sismique et l’évaluation des impacts selon les principes de l’archéosismologie. D’autre part, elle permet de déterminer la typologie des reconstructions associées.
- SIG associé
Un Système d’Information Géographique commun à l’ensemble du projet fait le lien entre les différentes données mobilisées pour l’étude des techniques de construction sismo-résistantes, et permet de développer une approche réellement multi-scalaire.
- Modèles photogrammétriques 3D
Des photographies des élévations sont réalisées sur le terrain, avec un drone pour une couverture rapide et de façon traditionnelle pour les points de détail. Toutes les images obtenues sont traitées par un logiciel permettant de construire un modèle tridimensionnel photogrammétrique de façon automatique et précise. Ce modèle virtuel 3D constitue une base de données spatiale offrant de visualiser toutes les données collectées sur les bâtiments étudiés.
- Sciences de la terre
L’origine des matériaux de construction, leurs propriétés mécaniques et les procédés de fabrication sont déterminés par analyses pétrographiques.L’étude des concrétions calcaires – dépôts constitués de séquences laminaires liées à des cycles annuels – permet de préciser la chronologie des dommages et des réparations tandis que l’archéomagnétisme des terres cuites architecturales permet de préciser la datation des phases de réfection.
- Ingénierie des structures
Associée aux observations archéologiques, l’ingénierie permet d’identifier les effets sismiques et de tester la vulnérabilité des bâtiments, à travers la géométrie, la caractérisation des techniques de construction et les propriétés mécaniques des matériaux utilisés.

Le projet est organisé en 4 étapes (WPS), obéissant à une progression scalaire. Le site de Pompéi se prête particulièrement bien à une investigation systématique, à petite échelle, en se focalisant sur des cas d’étude locale ((WP1 & 2) et, à large échelle, en en envisageant une approche urbaine (WP3) et régionale (WP4).

WP1. Les châteaux d’eau, infrastructures urbaines publiques. La remise en fonction des châteaux d’eau révèle la prise en compte de l’urgence dans l’évolution de l’urbanisme en condition de risque récurrent.
WP2. La Villa de Diomède, grande résidence aristocratique suburbaine. Ce deuxième point de vue montre que la reconstruction d’un habitat privé prend également en considération le désir de sauvegarde du décor.
WP3. Réfection et fabrique urbaine. Cette troisième étape se caractérise par une approche systématique d’une aire entière de Pompéi, dans le but de visualiser les réfections post-sismiques réalisées dans un ensemble. La région VII, soit 15% de la surface urbaine, a été choisie en raison de sa forte représentativité et de l’association de monuments publics et privés variés. Cet élargissement de l’étude permet non seulement de comparer les conditions de reconstructions, selon les différentes catégories de bâtiments, mais aussi de quantifier les dommages et ainsi de mieux déterminer l’intensité sismique.
WP4. Architecture du risque dans la Campanie. Les données des études précédentes sont alors confrontées avec celles recueillies sur l’ensemble de la région, afin de mettre en évidence les différentes manifestations géologiques (tremblements de terre, volcanisme, bradysisme) et les réactions humaines sur le temps long.

La recherche associera des opérations de formation pour les étudiants (stages, formation de doctorale).Le projet envisage une ample diffusion des résultats et de valorisation scientifique : un workshop intermédiaire, un colloque final, deux publications collectives, un atlas en ligne, une exposition.

Le projet permettra de révéler un aspect inédit de Pompéi, avec le tableau d’une ville en plein chantier de construction, associant infrastructures, habitat, fabrique et paysage urbains. Au-delà des résultats scientifiques, différentes perspectives se dessinent. D’une part, le projet peut avoir un impact patrimonial important, en mettant en évidence les caractéristiques méconnues d’une ville antique soumise aux tremblements de terre. D’autre part, en réunissant une équipe internationale de chercheurs spécialisés dans l’étude des techniques de construction et l’archéosismologie, il favorisera le développement de nouvelles technologies pour l’étude du patrimoine archéologique et sa préservation, comme l’association de l’archéologie, de la géologie, de l’informatique et de l’ingénierie.

Le premier atout du projet réside dans le fait ne pas se limiter aux bornes d’une étude de cas, en ouvrant plus largement la réflexion à la question de la vulnérabilité dans le monde romain et en posant la question de la spécificité / représentativité de Pompéi. Par ailleurs, un autre atout consiste dans l’ouverture temporelle, en participant d’une réflexion trans-périodes sur la mémoire des catastrophes. De ce point de vue, la collaboration avec des sociologues engagés dans l’analyse des conséquences du tremblement de terre de l’Irpinia en 1980 (des observations peuvent aussi être menées sur le tragique tremblement de terre récent de l’Aquila) engage à raisonner sur les conséquences des tremblements de terre (sociales, économiques, environnementales) et sur les mécanismes de reconstruction et d’intégration du risque sismique. Sensibiliser la population à la qualité des techniques de construction et à la vulnérabilité est riche d’enjeux, dans une zone fortement exposée au risque sismique et à une croissance immobilière difficilement contrôlable.

En cours :
2016 : WP1 (monographie)
2017 : WP2 (monographie)
2018 : WP2, WP3 et WP4 (atlas des techniques de construction on line)
2018 : WP3 and WP4 (2 articles)
2018 : exposition

Notre connaissance du risque sismique dans les villes romaines s’appuie principalement sur les sources textuelles qui rapportent, de façon plus ou moins fidèle, les dommages et les opérations de réfection. Mais les modalités pratiques des reconstructions et les techniques adoptées nous échappent en grande partie. RECAP se propose de les éclairer d’une façon nouvelle, à partir d’une interprétation pluridisciplinaire des données archéologiques. Dans l’histoire de la construction romaine, cette problématique n’a guère été abordée, alors qu’elle présente un réel enjeu pour comprendre le développement d’une architecture du risque et de l’urgence. Pour cela, le projet envisage de répondre à une question primordiale : confrontés à un risque récurrent, les bâtisseurs anciens ont-ils développé, en un endroit donné, des techniques de construction anti-sismiques ? Afin de développer cette approche, il est centré sur le laboratoire exceptionnel que constitue le site de Pompéi. En effet, cette petite ville de Campanie a été victime de plusieurs tremblements de terre dans ses seize années d’existence, le premier, en 62/63 ap. J.-C., étant particulièrement dévastateur.
Une étude systématique sera engagée sur le site, à grande et petite échelle, afin de caractériser les impacts sismiques, les opérations de réfection et les éventuelles innovations techniques. Deux études de cas ont été sélectionnées à cette fin, permettant d’appréhender des chantiers publics et privés : les châteaux d’eau, éléments vitaux et prioritaires dans le fonctionnement urbain, et une grande villa aristocratique, la Villa de Diomède, restée inédite. A l’échelle urbaine, une étude d’ensemble sera menée sur une région entière de Pompéi (Regio VII), afin de caractériser les opérations de réfection consécutives aux tremblements de terre. Elle permettra de dresser un tableau dynamique de l’économie de la reconstruction, impliquant la mobilisation d’hommes, de savoirs et de matériaux.
Au-delà de l’analyse de cas que constitue Pompéi, une plus large réflexion sera proposée sur la mémoire du risque et la conscience de la vulnérabilité en Campanie, incluant la zone vésuvienne et la zone des Champs Phlégréens. Sur ces deux territoires qui présentent une formation géologique et des manifestations sismiques différentes et qui, pour cette raison, ont été abordés de façon cloisonnée par la recherche, sera menée une approche conjuguée des effets des tremblements de terre et du bradysisme.
Ce projet est fondé sur une approche fortement pluridisciplinaire qui sollicite de façon étroite archéologie de la construction, sociologie, informatique, ingénierie des structures et géologie. Il permettra d’associer la formation des étudiants à l’étude conjointe du patrimoine archéologique et à la sismologie, à travers des stages doctoraux menés sur le terrain. Il envisage une valorisation importante des méthodes et des résultats, destinée à la communauté scientifique et au grand public : un site web, avec une base de données/SIG en ligne avec modèles 3D, deux monographies, des articles de synthèse, les actes d’un colloque international, une exposition. À travers la dimension historique, il permettra de sensibiliser le public à la tradition des techniques anti-sismiques, en particulier la population locale de Campanie, une région particulièrement exposée.


Coordination du projet

Hélène Dessales (Archéologie et Philologie d'Orient et d'Occident)

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

INRIA Paris - Rocquencourt Institut national de de recherche en informatique et en automatique
CJB Centre Jean Bérard, USR 3133 CNRS - EFR
IPGP Institut de Physique du Globe de Paris
Archéologie et Philologie d'Orient et d'Occident
UMR 8546 Archéologie et Philologie d'Orient et d'Occident

Aide de l'ANR 395 188 euros
Début et durée du projet scientifique : septembre 2014 - 48 Mois

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