ESPACE ET TERRITOIRE - ESPACE ET TERRITOIRE : LES ENIGMES SPATIALES DE LA VIE EN SOCIETE.

De la chaine du DIKtè au mont IDA: Territoire et formes d'oganisations communautaires en Crète du XIVe au VIe s. av. J.-C. – DIKIDA

La Crète centrale dans l’Antiquité : territoire et communautés humaines.

Recherches sur le territoire et les formes d’organisation communautaire en Crète centrale du XIVe au VIe s. av. J.-C. Analyse pluridisciplinaire des données archéologiques, historiques, paléoenvironnementales et géomorphologiques concernant les régions autour du massif du Diktè et du mont Ida.

Interactions homme/territoire en Crète centrale

L’équipe du projet DIKIDA se propose d'étudier deux régions de la Crète centrale (la Messara et le Mirabello) pendant leur développement de la civilisation mycénienne à l’épanouissement des cités grecques (XIVe – VIe s. av. J.-C.). Tous les types de témoignages disponibles seront analysés : vestiges archéologiques, sources écrites (inscriptions et textes littéraires), données paléoenvironnementales afin de mieux cerner les origines de la civilisation grecque en Crète. En effet, les habitants de l'île à l'époque historique puisèrent dans l'héritage de la civilisation minoenne et dans celui du système palatial centralisé mycénien dont témoignent les tablettes en linéaire B découvertes dans les palais de Cnossos et de Chania. D'importants phénomènes de déplacement de populations, influencés autant par des processus culturels qu’environnementaux, ont bouleversé l’île à la fin de l'Âge du Bronze et l’analyse pluridisciplinaire permettra de tracer un cadre plus clair de l’évolution des communautés humaines dans la Crète centrale et des choix opérés pendant cette phase de profonds changements. L’étude comparée des données archéologiques et géomorphologiques donnera une idée plus précise des caractéristiques du territoire où les communautés humaines s’installèrent au fil des siècles et de leur capacité à s’adapter au contexte naturel en évolution permanente. Ces recherches pourront déboucher sur des projets spécifiques visant à la conservation et à la valorisation d'un patrimoine culturel, environnemental et archéologique de renommée mondiale, celui de l'île qui fut le berceau de la première civilisation européenne et qui attire chaque année des milliers de visiteurs et de randonneurs.

En ce qui concerne les recherches archéologiques, la prospection pédestre est largement employée pour repérer les sites qui furent fréquentés du XIVe au VIe s. av. J.-C. Outre le repérage des lieux, accompagné de la description des restes encore visibles, on utilisera les GPS à main et le GPS différentiel, plus précis, afin de géoréférencer les sites. La réalisation de prospections géophysiques à Dréros et de carottages sédimentaires en Messara occidentale, méthodes nouvelles pour l’archéologie, permet de déterminer quelles étaient les formes du paysage à un moment donné de l’histoire crétoise et de définir leur évolution sur la longue durée. La réalisation d’un Système d’Information Géographique (SIG, logiciel ArcGis) facilite l’intégration des informations pluridisciplinaires à une base de données commune ; elle a été utilisée pour créer des cartes topographiques informatisées et des Modèles Numériques de Terrain (MNT) des sites les plus importants d’un point de vue historique (Lato, Dréros, Anavlochos, Phaistos). La présentation en trois dimensions des établissements et de leur contexte géomorphologique permettra au grand public de mieux cerner les caractéristiques des villes antiques découvertes dans les deux régions. Ces données sont mises à disposition d’un large public sur le site web du projet ; grâce au webmapping, il est d’ailleurs possible de visualiser les informations recueillies et de générer des cartes thématiques en fonction des intérêts spécifiques de chaque internaute.

La prospection pédestre a permis de repérer le site de Képhali Limni, sur la colline qui se trouve juste à l’est de Dréros : ici se développa un établissement de l’Âge du Bronze qui a vraisemblablement contribué ensuite à la fondation de la ville de Dréros. Dans l’agora de ce dernier habitat, les recherches géomorphologiques ont mis en évidence des anomalies qui correspondent à la couche de pierres sous-jacente le sol de la place publique. Le Modèle Numérique de Terrain permet de visualiser le site qui est formé d’une double acropole et d’un vaste territoire caractérisé par des formes karstiques spécifiques (poljé et dolines). La collaboration avec l’Ecole Française d’Athènes et la XXIV Ephorie d’Haghios Nikolaos a été particulièrement fructueuse et ouvre de nouvelles perspectives de recherche concernant notamment la zone du Kadiston, au nord de Dréros, et de l’isthme de Hiérapetra, très riche en sites archéologiques. Dans la Messara, le travail de repérage et de géoréférencement des sites archéologiques dans la plaine et sur les collines environnantes a permis de renseigner un Système d’Information Géographique (SIG) de la région ainsi que des cartes de visibilité. La collaboration avec une équipe de la Scuola Archeologica Italiana di Atene a débouché sur la campagne de carottages au pied de la colline de Phaistos et dans la partie occidentale de la plaine de la Messara ; une zone humide a pu ainsi être repérée au sud-est de Phaistos.

Les recherches des équipes du projet DIKIDA ont ouvert des perspectives de collaborations nouvelles avec les Ecoles italienne et française d’archéologie à Athènes afin d’améliorer notre connaissance des territoires de la Messara et du Mirabello dans l’Antiquité. La poursuite des recherches permettra de favoriser des projets locaux de valorisation des sites archéologiques et, plus généralement, de la culture locale dans des régions qui offrent de bonnes perspectives pour le développement d’un tourisme plus respectueux de l’environnement et du patrimoine culturel.

Les publications des membres de l’équipe DIKIDA, la participation à des colloques internationaux et à des tables rondes, la collaboration avec d’autres institutions françaises et étrangères témoignent de l’activité intense des spécialistes impliqués dans le projet. Il s’agit d’un exemple de recherche pluridisciplinaire qui montre à quel point ce type de collaboration est fructueux et porteur de nouvelles ouvertures intellectuelles. Un cas exemplaire à ce propos est celui de Phaistos, importante ville de la Messara dont on a étudié jusqu’à présent surtout les données archéologiques (D. Lefèvre-Novaro, « La naissance de la polis de Phaistos. Du site mycénien à la cité dorienne » dans J. DRIESSEN ET F. GAIGNEROT-DRIESSEN (éd.), The birth of the Cretan Cities. Conferences held in Louvain-la-Neuve in 2010-2011, (AEGIS VI), Louvain-La-Neuve, sous presse) et où M. Ghilardi a dirigé une mission de carottage aux résultats fort intéressants (Ghilardi M. et alii 2012. Palaeoenvironmental investigations in the vicinity of Ancient Phaistos (Crete, Greece) : preliminary results. EGU Assembly, 22-27 April 2012, Vienna, Austria. GM 4.7).

Le projet DIKIDA est né d'une collaboration entre les archéologues de l'UMR CNRS 7044 - UDS (Strasbourg) et les spécialistes des sciences de la terre et de l'environnement du CEREGE – UMR 6635 (Aix-en-Provence). L'équipe internationale se propose d'analyser l'évolution politique, économique, sociale et culturelle des communautés humaines installées en Crète centrale, dans la plaine de la Messara et dans la région du Mirabello, pendant la période qui va de l'Âge du Bronze récent à l'époque archaïque (XIVe-VIe s. av. J.-C.). L'étude diachronique de ces deux régions touchera non seulement aux thématiques archéologiques et historiques, mais aussi aux données paléoenvironnementales pour définir les stratégies d'adaptation des communautés à la réalité géomorphologique et topographique de l'île. D'un point de vue historique, la période chronologique retenue est fondamentale pour comprendre la transition d'un système palatial mycénien, fondé sur une économie centralisée, à l'organisation de la cité grecque, telle qu'elle apparaît dans le courant du VIIIe s. av. J.-C. Les troubles et les migrations qui accompagnent la chute de la société mycénienne affectent les fondements comme la culture matérielle qui caractérisent la vie communautaire ; ils exercent un impact considérable sur les institutions politiques et sociales, l’économie, les échanges commerciaux, la religion, les coutumes funéraires et les systèmes d’écriture. Au cours des XIIe et XIe siècles av. J.-C., et au terme d’une longue évolution, un nouveau type de société émerge et constitue les prémices de la cité grecque (polis). Cette nouvelle forme d’organisation communautaire se développe de manière continue jusqu’à la période archaïque (VIe s. av. J.-C.) avant de succomber elle aussi à une crise propre à l’île. La Messara, qui constitue la plaine la plus importante de l'île, est dotée d'un double bassin hydraulique et est délimitée au nord par le mont Ida, à l'est par le massif du Diktè et au sud par la chaîne des Astérousia. La région du Mirabello, qui s'étend sur la côte septentrionale, est caractérisée par la présence d'une étroite plaine côtière bordant le golfe homonyme ; elle est entourée de montagnes au sud et est reliée à la côte méridionale par l'isthme de Hiérapetra et à la zone de Mallia par la vallée de l'Anavlochos. À l'époque mycénienne, ces deux régions dépendaient de l'administration palatiale de Cnossos, mais à partir du XIIe s. av. J.-C. l’organisation de leur territoire reflète une fragmentation notable qui favorisera la naissance de nombreuses cités à partir des VIIIe-VIIe siècles av. J.-C. Pour comprendre pleinement la portée et les raisons de ces changements, l'approche paléoenvironnementale est désormais indispensable. La nature géomorphologique de l'île et l'existence de paysages dont la mer et les montagnes dessinent les traits ont obligé les populations à mettre en oeuvre des aménagements ingénieux pour s'adapter, par exemple, à la rareté d'eau en surface, aux affaissements de terrain, aux pentes abruptes du relief. Seule une analyse pluridisciplinaire du paysage, à travers des études de géomorphologie, de topographie et de paléoenvironnement permettra notamment d’évaluer l’intervisiblilité des sites ou d’établir si un type de formation géomorphologique présidait à l’installation des villages. Cette démarche novatrice, qui n'a été appliquée jusqu'à présent qu'à des secteurs limités des régions étudiées, portera à la création de modélisations numériques de terrain et de cartes géoréférencées thématiques, outils indispensables pour l'analyse des phénomènes liés à l'adaptation de l'homme à l'environnement au cours des siècles.

Coordination du projet

LEFEVRE-NOVARO Daniela (CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE ALSACE) – daniela.lefevre@orange.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CNRS DR12 - CEREGE CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE PROVENCE ET CORSE
CNRS CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION REGIONALE ALSACE

Aide de l'ANR 339 999 euros
Début et durée du projet scientifique : - 48 Mois

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