Blanc SVSE 4 - Sciences de la vie, de la santé et des écosystèmes : Neurosciences

Prise de décision pathologique dans l'addiction à la cocaïne: rôle du cortex orbitofrontal et de ses projections sur le striatum dorsal – DRUGORBITAL

Cortex préfrontal, prise de décision pathologique et addiction à la cocaïne

Ce projet a pour but de préciser la nature des dysfonctions corticales sous-tendant la prise de décision pathologique dans l’addiction à la cocaïne.

Découverte des dysfonctions corticales sous-tendant la prise de décision pathologique dans l’addiction à la cocaïne

La cocaïne est actuellement la deuxième drogue illicite la plus utilisée en Europe et son usage est en augmentation. Ce qui frappe le plus dans l’addiction à la cocaïne est son apparente irrationalité. Les personnes continuent à consommer la cocaïne de façon excessive, même si elles sont conscientes des dangers encourus et malgré leur propre désir de réduire, voire d’arrêter, leur consommation. Ce comportement ressemble à bien des égards à celui de patients dont le cortex préfrontal a été endommagé accidentellement. Cette similitude comportementale pourrait suggérer que les troubles de la prise de décision liés aux addictions auraient pour base des anomalies structurelles et/ou fonctionnelles du cortex préfrontal. Cette hypothèse est confirmée par des études récentes de neuroimagerie fonctionnelle révélant des dysfonctions dans le cortex orbitofrontal chez les personnes dépendantes à la cocaïne. Chez l’homme, le cortex orbitofrontal joue un rôle prépondérant dans la prise de décision normale. Face à un choix, il attribue une valeur différente aux actions possibles et compare ces valeurs afin d’informer en aval les régions sous-corticales responsables de la sélection de l’action, au premier chef desquelles se trouve le striatum dorsal. Le but de notre projet est de comprendre comment des altérations dans ces mécanismes peuvent conduire à la prise de décision pathologique dans l’addiction à la cocaïne.

L’origine et la nature exacte des dysfonctionnements neurobiologiques responsables de la décision pathologique dans l’addiction à la cocaïne restent mal connus, en grande partie du fait des limitations inhérentes aux études de neuroimagerie chez l’homme (ex : faible résolution spatiale et données corrélationnelles). A ce stade des recherches, il est nécessaire d’utiliser en parallèle un modèle animal pour réaliser de nouvelles avancées. Dans ce but, nous avons développé chez le rat – sujet d’étude le plus utilisé en biologie de l’addiction – une procédure unique au monde permettant d’identifier et de sélectionner rapidement et de manière reproductible les individus présentant une addiction à la cocaïne. Les animaux sont placés face au choix exclusif suivant : prendre une dose intraveineuse de cocaïne ou s’engager dans une autre activité gratifiante plus naturelle (i.e., boisson édulcorée). Face à ce choix, la grande majorité des animaux choisit de se détourner rapidement de la cocaïne et préfère l’activité alternative. Seule une minorité d’individus présente malgré le choix une forte préférence pour la cocaïne. Selon notre hypothèse générale, ces individus correspondent chez l’homme à la minorité des personnes qui développent une addiction à la cocaïne. Notre projet a pour ambition d’appliquer des techniques neurobiologiques invasives (e.g., inactivations corticales ciblées ; électrophysiologie in vivo) chez ces individus pour découvrir quelles sont les dysfonctions du cortex orbitofrontal responsables de la prise de décision pathologique observée dans l’addiction à la cocaïne.

Les résultats obtenus jusqu’à présent ne correspondent pas aux résultats attendus. Ils montrent que le cortex orbitofrontal n’intervient pas dans le choix de la cocaïne. Plusieurs interprétations peuvent être avancées pour expliquer ces résultats surprenants. Premièrement, ils peuvent indiquer que malgré son nom, le cortex orbitofrontal du rat ne serait pas homologue au cortex orbitofrontal humain. Les fonctions décisionnelles associées chez l’homme à ce dernier seraient implémentées dans une autre région du cortex préfrontal du rat. La région prélimbique du cortex préfrontal pourrait être un candidat potentiel. Nous avons par exemple récemment démontré que le cortex préfrontal prélimbique est impliqué dans le contrôle de la prise de cocaïne. Deuxièmement, nos résultats surprenants peuvent également indiquer que dans notre modèle et malgré les apparences, les rats établissent et expriment leur choix sans recourir à un processus décisionnel « délibératif et comparatif » suffisamment similaire à celui de l’homme, ce qui expliquerait l’absence d’implication du cortex orbitofrontal. Nous prévoyons de tester ces deux nouvelles hypothèses dans nos recherches futures.

En l’état actuel du projet, les perspectives sont principalement de nouvelles pistes de recherche à mener pour comprendre les bases corticales de la prise de décision pathologique dans l’addiction à la cocaïne.

- Mihindou C, Guillem K, Navailles S, Vouillac C, Ahmed SH (2012) Discriminative inhibitory control of cocaine seeking involves the prelimbic prefrontal cortex. Biological Psychiatry, sous presse
- International Conference on Addiction Research and Therapy, Las Vegas, USA, 20-22 août 2012

La cocaïne est actuellement la deuxième drogue illicite la plus utilisée en Europe et son usage est en augmentation. Heureusement, la plupart des consommateurs de cocaïne finisse par s’abstenir pour s’engager dans d’autres activités plus valorisées socialement. Seule une petite minorité d’usagers escalade leur consommation de cocaïne et éventuellement développe une addiction. Aux Etats-Unis, on estime qu’environ 10% des consommateurs de cocaïne deviennent dépendants, ce qui correspond approximativement à un million d’individus. L’extrapolation de cette estimation à la population européenne prédit qu’il y aura environ un million supplémentaire de personnes dépendantes à la cocaïne dans un futur proche.

Ce qui frappe le plus dans l’addiction à la cocaïne est son apparente irrationalité. Les personnes continuent à consommer la cocaïne de façon excessive, même si elles sont conscientes des dangers encourus et malgré leur propre désir de réduire, voire d’arrêter, leur consommation. Tout se comme si, leurs jugements et désirs rationnels n’influençaient plus de façon adaptée leur prise de décision. En fait, les comportements des personnes atteintes d’une addiction à la cocaïne ressemblent à bien des égards à ceux observés chez des patients dont le cortex préfrontal a été endommagé accidentellement. Cette similitude pourrait suggérer que les troubles de la prise de décision liés aux addictions auraient pour base des anomalies structurelles et/ou fonctionnelles du cortex préfrontal.

Des études récentes de neuroimagerie fonctionnelle chez les cocaïnomanes ont révélé en effet l’existence de dysfonctions métaboliques dans le cortex orbitofrontal, une région préfrontale située au-dessus des orbites oculaires. Le cortex orbitofrontal joue un rôle prépondérant dans la prise de décision normale. Face à un choix, il attribue une valeur différente aux actions possibles et compare ces valeurs afin d’informer en aval les régions sous-corticales responsables de la sélection de l’action, au premier chef desquelles se trouve le striatum dorsal. Dans l’addiction à la cocaïne, l’ensemble de ce processus décisionnel serait profondément altéré (c'est-à-dire, évaluation, comparaison et sélection des actions). Cependant, l’origine et la nature exacte des dysfonctionnements neurobiologiques responsables de cette altération restent très mal connus, en grande partie du fait des limitations inhérentes aux études de neuroimagerie chez l’homme (ex : faible résolution spatiale et données corrélationnelles).

A ce stade des recherches, pour réaliser de nouvelles avancées, il est nécessaire d’utiliser en parallèle un modèle animal. Dans ce but, nous avons récemment développé chez le rat – sujet d’étude le plus utilisé en biologie de l’addiction – une procédure unique au monde permettant d’identifier et de sélectionner rapidement et de manière reproductible les individus présentant une addiction à la cocaïne. Les animaux sont placés face au choix exclusif suivant : prendre une dose intraveineuse de cocaïne ou s’engager dans une autre activité récompensante. Face à ce choix, la grande majorité des animaux se détourne rapidement de la cocaïne et préfère l’activité alternative. Seule une petite minorité d’individus (i.e., ~15%) présente malgré le choix une forte préférence pour la cocaïne. Selon notre hypothèse générale, ces individus correspondent chez l’homme à la minorité des personnes qui développent une addiction à la cocaïne. Notre projet a pour ambition d’étudier ces individus pour découvrir quelles sont les dysfonctions de l’OFC responsables de la prise de décision pathologique observée dans l’addiction à la cocaïne.

Coordination du projet

Serge Ahmed (CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION AQUITAINE LIMOUSIN) – serge.ahmed@u-bordeaux.fr

L'auteur de ce résumé est le coordinateur du projet, qui est responsable du contenu de ce résumé. L'ANR décline par conséquent toute responsabilité quant à son contenu.

Partenaire

CNRS CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION AQUITAINE LIMOUSIN
CNRS CENTRE NATIONAL DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE - DELEGATION AQUITAINE LIMOUSIN

Aide de l'ANR 431 680 euros
Début et durée du projet scientifique : - 48 Mois

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